mercredi 17 septembre 2008

Paris, Jour 2

2 juin 2008


Première journée de promenade à Paris; nous avons retrouvé avec plaisirs nos repères, nos coins favoris.

Nous avons commencé par la Place de la Concorde, avec ses deux magnifiques fontaines et son obélisque gigantesque. J'ai appris que cette place avait été inaugurée en 1763 et s'appelait alors "Place Louis XV", puis qu'à la Révolution on l'avait renommée "Place de la République".

C'est là, ironiquement, que le fils de Louis XV, Louis XVI, et sa femme Marie-Antoinette ont été guillotinés (à quelques mois d'intervalle). Ça faisait bizarre de penser que j'étais assise là où un roi et une reine avaient perdus la vie - mais aussi, tout simplement, deux êtres humains.

Je sais bien que pour les Français, ça a une saveur un peu festive, cette révolution et ce tranchage de têtes royales...*hahaha* Moi, l'historienne monarchiste, je trouvais que ça avait plutôt un relent de tristesse... je ne pourrais parler de nostalgie; comment être nostalgique d'une époque qu'on n'a pas vécue? Pire, comment être nostalgique d'une forme de gouvernement dont je n'ai jamais senti peser le joug, et dont je sais très bien tous les désavantages pour le petit peuple dont j'aurais fait partie?

Guillaume m'a fait remarquer à quel point la route est longue entre cette ancienne place de la Révolution et la Bastille, où étaient maintenu prisonnier le couple royal... Ça a dû être un chemin de croix assez pénible, en charette, à travers la foule enragée, assoifée de sang...

Mais toutes ces idées un peu macabres n'allaient pas ternir ma bonne humeur d'être à Paris. Nous avions une mission assez délicate; on m'avait remis, à la dernière minute de ma dernière journée de boulot, l'équivalent d'un mois de salaire, que j'avais demandé qu'on dépose dans mon compte bancaire avant mon départ (eh ben oui, je voulais être sûre de recevoir ma paye!). Faute de temps, on me l'a remis en espèce sonnante... en livres sterling, évidemment. Étant membre de la banque HSBC en Angleterre, et sachant qu'elle était présente en France, j'étais confiance de pouvoir déposer tout mon magot en sûreté à Paris dans mon compte londonien.

Erreur. Première banque HSBC, on me dit qu'ils ne prennent pas les espèces étrangères, surtout pas un aussi gros montant, et qu'il m'aurait fallu un compte FRANÇAIS. Je m'insurge; HSBC en France ou en Angleterre, n'est-ce pas la même chose? Eh non; même nom, pas *aucun lien* entre les deux. Devant ma "face de Carême", mes complaintes et bougonnements, on me réfère à la succursale HSBC sur les Champs-Élysées. Bon... pourquoi pas, après tout? C'est loin, hors-programme, et surtout hors-budget au point où notre niveau de tentation est à zéro sur cette avenue célèbre - qui ne me fait pas saliver, souffrir ou damner, comme certaines filles...les boutiques de luxe, lorsque mon argent est utilisé ailleurs, 40 jours d'avance...bof! - mais c'est tout de même divertissant, et comment dire non à l'Arc de Triomphe, hum? Toujours aussi impressionnant cet Arc, aussi massif, et si bien posé en perspective...

Nouvel échec bancaire sur les Champs-Élysées, on me fait comprendre que je devrai parcourir l'Europe avec des milliers de d'euros/livres dans mes poches jusqu'à épuisement des stocks. Très drôle. Pendant que je réfléchis à des transactions de toutes sortes et plutôt coûteuses - par exemple, envoyer l'argent par transfert "Western Union" à ma mère, qui le déposera dans mon compte québécois, et pourquoi pas après faire un transfert vers mon compte bancaire londonien, tant qu'on y est? - on retourne dans le coin qui nous intéresse vraiment... le Centre.

La pluie s'est mise de la partie, alors on a décidé d'aller farfouiller les bacs de livres de St-Michel... mais en arrêt à la station de l'Opéra, sur un coup de tête, on s'est élancés hors du train; nous n'avions jamais visité l'Opéra, malgré nos nombreux séjours à Paris, et malgré sa beauté extérieure qui aurait dû nous y attirer plus tôt. Finalement la salle de spectacle était fermée, nous y retournerons donc dans les prochains jours.

St-Michel donc, et ses bouquineries retrouvées avec plaisir, où Guillaume et moi pouvons passer des heures en quête de belles aubaines - et il y en a toujours! J'y ai acheté un roman sur la Guerre de Cent Ans, et un recueil de contes et fabliaux du Moyen-Âge... livres de poche pour se mettre dans le "bain" français.

Puis, épuisés de déshydratation et les pieds fatigués (entraînement intensif, nous en avons pour 40 jours, aussi bien s'habituer au plus vite!), nous avons acheté une giga-bouteille d'eau, et nous nous sommes dirigés....vers notre chocolatier préféré.

La Chocolaterie Peter Beier, 62 rue Monsieur le Prince - là où il y a les restos de sushis -, près du jardin du Luxembourg, est un endroit fabuleux. De la vitrine, une fontaine de chocolat nous attire à l'intérieur. En entrant, une odeur exquise, olfactivement organismique (oui oui!) nous saute au nez. Tout est blanc, murs, comptoirs, planchers, tablier du chocolatier. Et ce chocolatier (Lars de son prénom)... son chocolat et lui sont sur un pied d'égalité quant à l'attrait de l'endroit. Bref, on vient autant pour le personnage que pour les saveurs chocolatées. Danois, si mes lectures sont exactes. Roux pour ce qu'il en reste, une seule couette sur le front, un peu à la Arthuro Brachetti, un peu à la Tintin. Des lunettes extravagantes, "à l'envers", montures foncées - quoique j'ai lu qu'il possédait 10 paires! Il portait la moustache lors de notre dernière visite, nous étions étonnés de son "absence" cette fois-ci. Guillaume a tenté le dialogue, avec une petite touche de familiarité; avec ce genre de personnage, on a envie qu'il sache qu'on est des clients fidèles: "Vous avez coupé la moustache?"



Il faut savoir, le chocolatier, il ne parle presque pas. Malgré ses quelques années de présence en terre parisienne, il semble maîtriser imparfaitement le français, quoiqu'il se débrouille bien. Il a un accent prononcé, qui ajoute à son excentricité. Sa personnalité le rend encore plus difficile d'approche; lorsque vous commandez des chocolats, ne vous attendez pas à une interaction "normale". Il faut attendre qu'il soit "prêt", "dispos", et d'un autre côté, ne pas s'attendre à des conseils et du service attentionné. Il chantonne, valse même un peu derrière le comptoir, et soudain, il prend le chocolat que vous lui aviez demandé 5 ou 10 secondes plus tôt. Il répond parfois à nos interrogations sur ses chocolats... mais pas toujours avec le délai qu'on avait prévu. Un personnage, voilà. Qui n'a plus de moustache, donc. Surpris de notre question, pris à court dans sa façon régulière d'interagir avec les clients. Il a fait un signe d'impuissance, de surprise, et a répondu un laconique "Les femmes!" Sa femme, oui. Une danoise aussi probablement, au style un peu germanique, en fait. Froide, rousse, la mâchoire décidée, les lèvres minces, un peu pincées. Lors d'un précédent voyage, accompagnée des parents d'une amie qui étaient en visite, ces derniers avaient voulu prendre une photo du chocolatier. Elle avait refusé bien net. Il avait fallu prendre des photos de l'extérieur. Très protectrice de son petit mari. Elle a sûrement exigé "la fin de la moustache", et il a dû se plier. Mais là, on extrapole, parce que le personnage est si mystérieux, on prolonge ses courtes réponses, on développe, on imagine, on fabule.

Quant au plaisir gustatif de visiter la chocolaterie Peter Beier, il est immense. Guillaume m'offrait un chocolat chaud - on avait goûté un délicieux chocolat épicé, très piquant, âcre, et pas sucré du tout la dernière fois, une expérience très intéressante - mais avec la chaleur moite et grise de Paris, nous avons plutôt opté pour une glace maison, une nouveauté pour nous (puisque notre séjour parisien précédent était en automne). Et puisque nous voulions utiliser les toilettes (pas si faciles à trouver que ça à Paris, quoique tout de même plus que dans d'autres grandes villes européennes), nous avons pris l'option "Eat-in"; 6 euros la glace pour un joli petit verre transparent rempli... de délectable crème glacée. La mienne était à l'églantine (petit fruit rouge) et aux éclats de chocolat noir. Absolument divine, onctueuse, fruitée, sucrée, rafraîchissante, rugueuse sur la langue... PARFAITE. Guillaume avait choisi chocolat et pâte d'amande mélangée dans la crème glacée... c'était succulent aussi. On a eu la pièce du haut de la chocolaterie à nous seuls pendant un moment, et avec le soleil qui se pointait enfin, les balcons en fer forgé d'en face, l'animation de la rue, le décor blanc et chocolat de l'endroit... c'était génial.




Pour prolonger le plaisir, nous sommes ensuite allés nous asseoir au soleil dans le Jardin du Luxembourg, face au bassin et au Palais - l'actuel Sénat français. Là, avec la vue magnifique, le soleil chaud... je me suis mise à sommeiller de bonheur et de sucre.... (et essayant de lire mes contes et fabliaux, sans trop de succès!)



Après une heure, nous sommes rentrés, épuisés. Nous avons fait un arrêt à "notre" Franprix, celui près de la Maison des Étudiants Canadiens, dans le même quartier où vit maintenant Bertrand. Pour les roesti surtout (préparation en sachet de pommes de terre rapées, salées, qu'on fait cuire en galette dans la poêle, avec de l'emmenthal rapé par-dessus...on mange ça au petit déjeuner, et on est heureux ;o)). Si près de la MEC, nous y avons fait un petit arrêt... Ça a fait tout drôle de retourner dans mon "chez-moi parisien" après tout ce temps, un an et demi après mon départ. C'est plus tout à fait pareil, les copains n'y sont plus - du moins, la majorité -, pas grand chose n'a changé, ça reste un endroit plein de souvenirs agréables... mais... "Move Forward!"



Après un souper avec Bertrand, son coloc Julien et sa copine Malala et un invité, nous sommes retournés voir les vieux copains de la MEC qui y sont encore. "Débauche" habituelle - le vin n'est pas cher, vive la France!!! - mais il manquait les "essentiels", ceux avec qui on passait toutes nos soirées... Nous sommes rentrés à 1h30 du matin, et j'avoue que le regret était grand de ne plus avoir ma chambre à l'étage d'en-dessous, avec ma salle de bain, mon lit, mes trucs, mon confort, "mes affaires"... le chemin du retour aurait été moins long, premier constat d'un voyage de 40 jours sans le confort "de mes affaires"!!


6 commentaires:

Anonyme a dit…

Hum, c'est si bien décrit... j'avais l'impression en te lisant de "sentir" Paris... d'y voir ce ciel bleu pâle que j'aimais tant... le jardin du Luxembourg, l'Arc de Triomphe.... ahlala, que de souvenirs...
Ce week-end, mon frère est descendu de Paris, pour trois jours chez nous... j'ai demandé des nouvelles de mon ancien quartier (Bastille), dans lequel il traîne encore... j'ai ressenti de la nostalgie... j'y ai tellement traîné mes godasses, en poussant mes bébés filles dans leur poussette... vers la Gare de Lyon, bercy....
La nostalgie est encore plus forte après t'avoir lue... tu aimes Paris. On le sent jusqu'ici.
Très jolies photos aussi....
Guillaume a-t-il trouvé le livre qu'il cherchait??? Les rois maudits, c'est ça?
Je vous embrasse tous les deux....

Beo a dit…

Pas facile de retourner dans SES quartiers quand la majorité des habitants de notre temps, comme on dit: n'y sont plus!

Tu sais probablement que les röestis c'est suisse?

Dire que j'ai à peine goûté une fois ou deux.... vous mangiez ça pour déjeuner??????

Tania a dit…

@ Véro: oui, on aime Paris, passionnément, à la folie!! Comment ne pas l'aimer ;o) Je crois que j'aurai toujours une petite nostalgie de Paris, rien à faire, c'est enraciné en moi ;o)
Guillaume a trouvé tous ses Rois Maudits, il a dû en acheter 2 neufs par contre, on partait de Marseille pour l'Italie et la Grèce, et ça voulait dire plus aucun espoir de trouver nos romans en français! Mais bon, ça a très bien accompagné nos voyages en train et nos journées de plage, et aujourd'hui, on a une collection "qui a du vécu", à force d'être trimballée dans le fond de nos sacs (ok, ok, dans le sac de Guillaume ;o)).
Bisous à vous 5, ça fait plaisir de te lire ici ;o)

Tania a dit…

@ Beo: C'est vrai que les gens sont aussi importants que tout le reste quant à l'affection qu'on a pour un endroit... puisque ce sont eux qui font l'ambiance, qui font que l'expérience est positive ou négative... Sans eux, ce n'était pas tout à fait pareil... eh bien, on s'organise un "pot" dans quelques semaines pour réunir le plus de gens possible de la MEC d'il y a 2 ans... Évidememnt, ils n'y seront pas tous... recréer la MEC à Paris sans ses "piliers", ou recréer la MEC à Montréal avec ses piliers... Où sentira-t-on le plus l'esprit de Paris? Je n'en sais rien... on verra ;o)

Et oui, je savais que les röestis étaient suisses, la cuisine suisse est d'ailleurs pas mal bonne ;o) Au "ptit" déjeuner, avec des oeufs brouillés, ça remplaçait avec délice les petites patates rôties... ;o) (faut pas oublier l'emmenthal râpé!!)

Évangéline a dit…

wow ca l'air bon ca des röestis! Et le chocolat miammmmm

Tania a dit…

@ Evangeline: Les röestis, c'est tellement bon, qu'on en a ramené 2 sachets à la fin de notre séjour de 4 mois en France....on en aurait rapporté plus, si nos valises n'avaient pas été si lourdes déjà ;o) Depuis, chaque fois, c'est immanquable, il nous faut notre dose ;o)
Quant au chocolat... plus difficile à ramener, premièrement, c'est si fragile, et deuxièmement, bien trop bon pour qu'il en reste jusqu'à l'aéroport... ;oP